Dans cette exposition, Natalja Scerbina présente un corpus d’une trentaine d’œuvres réalisées selon le procédé du cyanotype, sur papier et sur toile. Mise au point en 1842 par le scientifique britannique John Herschel, cette technique ancienne est notamment associée à Anna Atkins, pionnière de la photographie botanique, qui l’a utilisée pour créer une véritable encyclopédie d’images végétales. Le cyanotype repose sur une réaction photosensible : un support préalablement enduit d’une solution chimique devient sensible à la lumière. Une fois exposé au soleil ou à une source de rayons UV, il révèle une image aux nuances caractéristiques de bleus profonds, communément appelée bleu de Prusse.
Le processus de création de Natalja Scerbina s’inscrit dans une approche post-anthropocentrique de l’art, où l’attention portée au vivant, au non-humain et aux matières marginalisées devient un geste critique. Son travail se nourrit des éléments hétérogènes qu’elle amasse, cueille et trie : roches, sable, fragments végétaux, rebuts, matières transformées. Ceux-ci peuvent être utilisés à la composition des œuvres ou se révéler être des points de départ opérant comme genèse à la création. Ces matériaux, qu’ils soient organiques ou issus des résidus de l’activité humaine, deviennent les vecteurs d’une pensée écologique du sensible.
Ses œuvres ne cherchent pas à dominer la matière, mais à cohabiter avec elle. Elles rendent perceptibles des formes de présence souvent ignorées, révélant les tensions entre le visible et l’invisible, le naturel et l’artificiel. Ce déplacement perceptif invite à une reconfiguration de notre rapport au monde, à la fois matérielle et affective, où chaque fragment porte la mémoire de son environnement. Dans cette esthétique du résiduel, Scerbina propose une lecture relationnelle et non hiérarchique du vivant, où les œuvres deviennent des écosystèmes à part entière.
Notes biographiques
Natalja Scerbina est titulaire d’un baccalauréat en histoire de l’art et en arts visuels de l’Université Concordia. Depuis 2006, elle a participé à de nombreuses expositions individuelles et collectives. Plus récemment, ses œuvres ont été présentées dans l’exposition hors cadre : œuvrent des artistes parmi nous, au Musée des beaux-arts de Montréal (2021). Également en 2021, le Musée national des beaux-arts du Québec a acquis une de ses œuvres, tandis que l’exposition De nos gestes fragiles marquait le début de sa collaboration avec la Galerie Simon Blais en 2023.